Les études de marché ont finalement peu évolué tout au long du XXième siècle : malgré leurs progrès techniques, elles cherchent toujours à faire correspondre une offre spécifique à chaque segment de clientèle. Pourtant, nous sommes à l’aube d’une révolution dans ce domaine grâce au numérique…
Les nouveaux challenges
En effet, les nouvelles technologies permettent la circulation et le stockage d’informations de façon immédiate, omniprésente, universelle et pérenne. Cela impacte durablement la façon de consommer : recherche immédiate de la meilleure offre, place de marché mondiale, catalogue de choix gigantesque, archivage sans limite de l’historique des données et documents commerciaux, etc. Le premier des nouveaux challenges des études de marché est donc de prendre en compte cette vision élargie du marché.
Ceci s’effectue maintenant avec des outils de veille concurrentielle automatiques qui collectent et communiquent quotidiennement à l’entreprise des données sur tous ses rivaux du globe.
Du Social-buying…
On assiste aussi à une participation plus active des consommateurs avec le « social-buying ». Le Web 2.0 et les réseaux sociaux permettent aux clients d’interagir et de faire remonter des informations sur la place publique : les consommateurs donnent leur avis, s’entraident sur les forums, diffusent des vidéos sur les applications mobiles, etc. Cela donne un nouveau pouvoir aux consommateurs qui peuvent dénoncer librement toutes sortes d’abus et les défaillances des marques.
Grâce à des programmes d’analyse sémantique automatisée, les études de marché peuvent collecter toutes ces opinions pour en faire des synthèses de tendance. La marque peut ainsi mieux corriger les défauts de qualité mais aussi anticiper les attentes des consommateurs. Mais de la même façon, l’actualité a également montré que ces nouveaux outils facilitent la propagation de rumeurs et la diffusion de scandales, dont la sanction de marché est beaucoup plus rapide qu’avant.
… à l’inversion des rôles
On assiste enfin à une inversion des rôles entre producteurs et consommateurs, phénomène appelé « Uberisation » ou « économie du partage ». Les nouvelles technologies permettent à tout un chacun de devenir producteur ou prestataire de service : e-commerce, location, transport, hôtellerie-restauration, revente d’occasion, vente directe, etc. Tout ce pan de la nouvelle économie est encore difficilement appréhendable par les études de marché car ses flux financiers échappent souvent aux circuits traditionnels.
En revanche, des outils numériques peuvent remonter massivement des informations statistiques sur les comportements en ligne des consommateurs, appelées « Big Data ». C’est là le nouvel avenir des études de marché : au lieu de travailler sur des groupes de consommateurs, le Big Data permet une approche réellement personnalisée afin d’individualiser les offres, réduire le gaspillage et augmenter la satisfaction de tous.
Le prochain défi des professionnels des études sera donc de synthétiser et d’exploiter ces données le plus rapidement possible, tout en garantissant la déontologie scientifique et le respect de la vie privée des citoyens, et d’éviter ainsi la déshumanisation d’une économie qui se veut pourtant plus proche du consommateur.
Michel Polski
Michel Polski est intervenant à l’ISEMA depuis 2012 en Études de Marché.
Après avoir débuté sa carrière comme responsable de grande surface alimentaire, il a obtenu un Doctorat de Sciences de Gestion à l’Université Louis Pasteur de Strasbourg et occupe la fonction de Professeur de Marketing à Grenoble Ecole de Management.